Il y a deux ans, le stade d’Oyem avait fait l’objet d’actes de sabotage. Suite à cela, deux compatriotes avaient été arrêtés, torturés et placés sous mandat de dépôt pendant 20 mois à la prison centrale de Libreville. Si le tribunal correctionnel spécial vient de les innocenter, cette affaire démontre la légèreté avec laquelle certains officiers de police judiciaire mènent les enquêtes et avec quelle facilité des magistrats placent les accusés présentés sous mandat de dépôt. Au point d’avoir instauré en norme cette mesure pourtant exceptionnelle.
Arrêtés, torturés puis placés sous mandat de dépôt à la prison centrale de Libreville, N’nang Mezui Anathole et Essimegame Ondo viennent d’être déclarés non-coupable des crimes de destruction des biens publics, incitation à la révolte, participation à un mouvement insurrectionnel et association de malfaiteurs. La décision a été rendue le 10 juin dernier par le Tribunal correctionnel spécialisé.
Un soulagement pour les deux prévenus qui ont passé 20 mois à la prison centrale de Libreville pour des crimes qu’ils n’ont jamais commis. Cette injustice est la conséquence de la décadence et de la faillite d’un système judiciaire où le placement sous mandat de dépôt est devenu une norme alors qu’elle devait être une exception. Pire, cette affaire dénote de la précipitation avec laquelle les officiers de police judiciaire (OPJ) mènent les enquêtes au point de confondre leurs chimères à des vérités attestées par des faits.
D’ailleurs, tout au long de ce procès, l’un des avocats de la défense, Me Obame Sima, a fait la démonstration de ce qu’il n’y avait aucune preuve dans le dossier attestant la culpabilité de ses clients. « Montrez-moi une affiche d'Anathole où il incite à la révolte ! Montrez-moi une personne qu’Anathole a appelé pour aller troubler le 17 août à Oyem ! Le ministère public doit être honnête, en disant qu'à la suite de l'instruction à la barre, il n'y a rien, donc prononcer la relaxe », relevait l’avocat.
Un réquisitoire d’autant plus pertinent que même le témoin appelé et qui était censé confirmer la culpabilité des inculpés va se dédire. Medzo Jacque Chirac, c’est de lui dont il s’agit, va avouer à la barre qu’il avait été utilisé par l’antenne d’Oyem des services de la contre ingérence militaire pour faire arrêter Mezui Anathole et Essimegame Ondo. « J’ai appelé Anathole sous la menace des agents », va témoigner ce dernier au tribunal avec une pointe de désolation.
Sauf que ces mots d’affliction ne changeront rien à la souffrance infligée à ces deux compatriotes qui ont eu le malheur d’être fichés par les services de renseignement comme des opposants capables de commettre sur le territoire national des actes visant à la déstabilisation du pays. Du coup, lorsqu’ en août 2020 des individus cagoulés posent des actes de destruction du stade d’Oyem en vue de s’opposer à la gouvernance du régime en place, les services du B2 tombent à bras raccourcis sur ces deux compatriotes sans au préalable avoir mené une enquête sérieuse. Conséquence, personne ne s’aura rien de l’identité des véritables auteurs de ces actes tout comme des cellules d’activistes qui avaient projetées de déstabiliser le Gabon à partir des pays européens en 2020.
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