IMG-LOGO
Accueil Article Session Criminelle Spécialisée : « l'accusé aurait detourné plus de 600 millions de Fcfa durant ses deux années d'exercice à la tête de CNAMGS »
Société

Session Criminelle Spécialisée : « l'accusé aurait detourné plus de 600 millions de Fcfa durant ses deux années d'exercice à la tête de CNAMGS »

IMG Renaud Allogho Akoué accusé de malversations financières.

Compte-rendu de la première journée d'audience de Renaud Akoué Allogho, ancien Directeur Général de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie et de Garentie Sociale (CNAMGS), poursuivi pour détournements de fonds publics, concussion, blanchiment des capitaux ( articles 127, 141, 378 Code pénal gabonais).

 

 

Cette première journée d'audience du mercredi 3 août 2022, a été consacrée à l'étude de la personnalité de l'accusé.  À 10h20, la Cour a fait son entrée dans la salle d'audience. Renaud Akoué Allogho est appelé à la barre.

 

Le Président passe ainsi à la vérification des assesseurs présents dans la salle. Pendant ce temps, un téléphone sonne. Malheureusement, le Président de la Cour demande aux agents de la sécurité de lui apporter le téléphone qui vient de sonner. Le téléphone est saisi et remis au Président.

Après la prestation de serment des jurés, le Président donne la parole au Ministère Public, représenté par l'avocat Général, Pambou Lingombe Brice Arnaud.

 

L'avocat Général interpelle les jurés en leur demandant de prendre conscience de la grande responsabilité qu'ils ont de faire partie de cette Cour criminelle. Il renchérit en disant aux nouveaux membres de la Cour : "Si vous ne craignez pas les Hommes, craignez Dieu."

La Cour étant déjà constituée conformément à la loi, le Président demande au greffier en Chef de faire lecture de l'arrêt de la Chambre d'Accusation.

 

10h41. Selon l'arrêt de renvoi, c'est le 4 novembre 2019 que, suite à une dénonciation anonyme, l'agence judiciaire de l'Etat a saisi la Direction Générale de Recherche (DGR) pour faire état de plusieurs malversations financières.

 

Suite à cela, une enquête a été ouverte et a révélé que l'accusé a detourné plus de 600 millions de fcfa durant ses deux années d'exercice à la tête de CNAMGS. En effet, il lui est reproché d'avoir aloué 4.400.000 FCFA au lycée Awassi, au titre de frais de scolarité de certains élèves orphelins. Il lui est aussi reproché d'avoir décaissé 40 millions pour les lampadaires solaires avec une société à Oyem.

 

Sur le délit de concussion, il est accusé d'avoir perçu 160 millions pour la signature d'un contrat avec des pharmacies et des structures hospitalières.

 

Il est aussi fait grief à l'accusé d'avoir surélevé une facture qui faisait 1 milliard à 1,6 milliards, qu'il a présentée au Conseil d'administration de la CNAMGS.

 

Concernant le blanchiment des capitaux, il est reproché à l'accusé d'avoir vu son patrimoine immobilier s'accroître durant ses 2 ans de gestion. Construction de villas avec piscine vers le stade d'Agondje et plusieurs autres appartements en location.

 

Sur l'usage de faux, l'accusé a bénéficié d'un non lieu.

 

Après la lecture de l'arrêt de renvoi, le Président de la Cour dit à l'accusé que si les faits qui lui sont reprochés sont avérés, il encourt 20 ans de réclusion criminelle et 100 millions d'amende.

Place à l'étude de la personnalité de l'accusé.

 

Le Président ouvre les hostilités avec une série de questions à l'accusé : " Vous êtes né où ?" ; "vous avez fait vos études où? ..."

 

L'accusé est né le 6 décembre 1978 à Oyem, il fait une partie de ses études au pays. Il a obtenu son Baccalauréat à l'âge de 16 ans, il n'a jamais redoublé une classe à l'école. Même à l'étranger, chez les "Blancs," il était toujours parmi les meilleurs étudiants. C'est un expert financier.

Le Président de la Cour va même faire observer à l'accusé qu'il était très brillant à l'école. Mais Renaud Akoué Allogho joue à la modestie. En disant que ses enseignants disaient tout cela de lui.

L'un des avocats de la défense, Me Eyogho Stéphane, pose la question de savoir à quel âge il est entré dans la vie professionnelle.

Réponse de l'accusé : 21 ans.

 

L'avocat pose encore une question dans le même sens.

"A quel âge avez-vous commencé à occuper des postes à responsabilité ?"

Réponse : 27 ans. Il a occupé plusieurs postes à responsabilité à Ogar. Il a travaillé au Togo, Bénin Cameroun et que par an, il pouvait cumuler des émoluments variant entre 100 millions et 150 millions.

 

L'avocat lui demande qu'est ce qu'il faisait avec cet argent. L'accusé répond en disant qu'il a investi notamment dans sa maison d'Okala. Le Ministère Public, à son tour, pose la question à l'accusé, en disant que puisque Renaud Akoué Allogho a un quotient intellectuel très élevé, peut-on dire qu'il était plus malin que les autres ?

 

Mais les deux avocats de Renaud Akoué Allogho, Me Loundou et Me Eyogho vont dire à la Cour que "cette question est tendancieuse."

 

Le Président reprend la Parole en disant "Je me rends compte que vous étiez bien dans vos différents postes, pourquoi vous avez accepté de venir travailler à la CNAMGS ?"

Réponse : Renaud Akoué Allogho dit à la Cour qu'en 2017, alors qu'il était au Togo, c'est ainsi qu'il avait reçu le message de Brice Laccruche Alihanga, Directeur de Cabinet du Président de la République (DCPR), lui demandant de venir en urgence au Gabon.

 

Vu l'insistance du DCPR, Renaud est venu au Gabon, puis a été reçu par le DCPR, au lendemain de son arrivée au Gabon, au Palais Présidentiel. C'est au cours de cette audience, que le DCPR lui avait expliqué que la CNAMGS connaît d'énormes difficultés, et qu'il faut une personne comme lui pour relever la structure.

 

C'est ainsi que par amour du pays, il a accepté de relever le défi.  Un jour, après sa rencontre avec le DCPR, il a été nommé en Conseil de Ministère comme DG de la CNAMGS.

Le Président rétorque, en disant à l'accusé qu'il est redevable à BLA, vu que c'est lui qui avait facilité sa nomination à la CNAMGS. Mais l'accusé dit qu'il n'est pas redevable, qu'il a accepté de relever un défi.

 

Le Président aborde la question de son appartenance à l'AJEV.

L'accusé dira que c'est plus tard qu'il a adheré à l'AJEV, il était membre d'honneur de l'AJEV à Oyem. C'est également après sa nomination qu'il a adhéré au PDG.

Le Ministère Public pose une autre question à l'accusé, celle de savoir : Comme il a eu des responsabilités très tôt et son père est décédé également tôt, avait-il sur le dos la responsabilité de la famille ?

 

Réponse : L'accusé explique que son père est décédé en 2012, qu'à cette période ses sœurs travaillaient déjà, et qu'il ne s'occupait que de ses enfants. Sa mère est une femme d'affaires depuis longtemps, c'est elle qui a payé ses études.

 

Le Président va même lui dire : "Donc vous êtes né avec une cuillère en or à la bouche."

L'un des avocats de l'Etat gabonais, pose la question de savoir si au cours de son entretien avec BLA, il avait parlé de salaire.

 

L'accusé répond en disant à la Cour qu'il n'a pas parlé de salaire avec BLA. Mais BLA lui avait dit que s'il réussi à relever le défi, le Patron (le Chef de l'État) sera content.

Me Agondjo, l'un des avocats de l'Etat gabonais, répondit en disant que si l'accusé aimait tant le pays, s'il était vraiment venu pour relever une structure en difficulté et non pour l'argent, pourquoi n'a t-il pas dit à BLA que son salaire devait rester à 6 millions comme son prédécesseur ? Pourquoi a-t-il accepté 10 millions de salaire ?

 

L'accusé réagit en disant qu'il ne connaissait pas le salaire de son prédécesseur.

Me Angondjo réplique en disant que l'accusé est venu à la CNAMGS parce qu'il gagnait entre 300 et 400 millions par an. Soit le double de ce qu'il avait dans ses précédentes fonctions.

Les questions semblent aller de partout, le public se demande même si nous sommes toujours dans l'enquête de personnalité ou dans les débats au fond du blanchiment des capitaux.

Le Président lui même, va finir par recadrer le débat.

 

Le Président pose la question à l'accusé, si au PDG il avait également un salaire.

L'accusé va dire qu'il n'avait pas de salaire. Mais le Président insiste sur sa question : "Donc on ne vous donne pas souvent de l'argent au PDG?"

 

L'accusé répond en disant que c'est seulement en période électorale. En 2018, lors des élections municipales et législatives, le PDG lui a remis 140 millions pour faire la campagne à Oyem, dans la localité où il était candidat.

 

Le Président poursuit ses questions sur le profil de l'accusé.

Il pose la question à l'accusé : "Combien d'enfants avez-vous ?"

Réponse : neuf, l'aînée a 21 ans.

 

Le Président rétorque en demandant l'âge du benjamin, mais Renaud Akoué Allogho peine à répondre. Il finit par dire que son dernier enfant est né le jour où il a été arrêté et qu'il n'a jamais vu son dernier enfant. Homis sur les photos. L'accusé enlève ses lunettes pour essuyer ses larmes. Mais trop tard, toute la salle s'est rendue compte que l'accusé pleure. La salle est émue.

Ainsi, Président de la Cour a suspendu l'audience. La suite est prévue pour jeudi 04 août 2022, pour les débats au fond.

 

SOS Prisonniers Gabon, pour l'Indépendance de la Justice.

HUMANISONS LES PRISONS

 

 

Partagez:

0 Commentaires


Postez un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs marqués * sont obligatoires