Jean-Marie est retraité depuis six ans. Ancien sous-officier supérieur dans l’armée gabonaise, ce sexagénaire doit effectuer, depuis le mois de janvier 2022, le voyage sur Libreville pour percevoir la prépension en tant que retraité. Cette prépension, qui s’élève à peine à 200 mille Fcfa, est insuffisante, pour qu’il parvienne à boucler ses fins du mois. Sauf que pour des raisons qu’il ne comprend toujours pas, sa banque, la Bicig, lui impose d’effectuer le voyage sur Libreville, afin de percevoir sa maigre allocation à travers un chèque comptoir.
Jean-Jacques est, lui, enseignant dans un établissement primaire. Depuis quelques années, il est en stage à l’extérieur du pays. Son salaire, qui est viré chaque mois par l’Etat gabonais, lui permettait, depuis la France, son lieu de stage, de mener les transactions financières nécessaires pour vivre. Sauf que depuis fin décembre, il est plongé dans la précarité par Bicig. Sa carte bancaire ayant expiré, il a été obligé d’avoir recours à signer une procuration à un de ses frères, pour que ce dernier perçoive son salaire et le lui fasse parvenir via les structures de transfert d’argent. Comme Jean-Marie, Jean-Jacques ne dépense pas moins de 50 mille Fcfa par mois pour percevoir son salaire.
Comme ces deux clients, de nombreux usagers de cette structure bancaire vivent depuis cinq mois ce cauchemar. L’établissement, qui est, entre-temps, devenu la propriété du groupe ivoirien Atlantic Financial Group (AFG CEA), est incapable de mettre à la disposition des usagers de nouvelles cartes bancaires. Tout se passe comme si le client était responsable de cette situation, puisque la structure ne daigne même pas établir un dialogue permanent avec les usagers, pour s’excuser des désagréments causés et, éventuellement, informer des dispositions prises pour résoudre le problème.
« Ils se comportent comme si on leur demandait l’aumône », fustige Jean-Marie. Nous sommes, le 05 avril 2022, ce retraité est exténué de devoir effectuer un voyage aller-retour Oyem-Libreville par mois, alors que son état de santé ne le lui permet plus. Mais ses plaintes à l’endroit de son gestionnaire ne change rien à la situation. Gêné et impuissant, l’agent de la Bicig n’a qu’une seule phrase à la bouche : « Désolé papa, il n’y a pas toujours de nouvelles cartes ». Agacé, Jean-Marie menace de changer immédiatement de banque, si la situation n’est pas réglée dès le mois prochain. « Si, jusqu’ici, je n’ai pas lancé la procédure de changement d’établissement, c’est parce que cela risque de mettre du temps et retarder davantage le virement de ma maigre prépension », explique-t-il très révolté.
Une révolte tout aussi partagée par Jean-Jacques qui ne comprend pas que la qualité de service de la première banque gabonaise, en matière de portefeuille clients, se soit autant dégradée au fil des années et de changement de propriétaires. « C’est une aberration ! En France, pour un service aussi simple, la banque procède au renouvellement de votre carte des semaines, voire des mois avant. Elle soucie de ne pas mettre son client dans une situation inconfortable. Ce qui n’est pas le cas au Gabon où la Bicig s’évertue à faire vivre l’enfer aux usagers sans avoir à se justifier. C’est incroyable », se désole Jean-Jacques.
Atlantic Financial Group, c’est déjà un échec ?
AFG CEA, le groupe ivoirien, devenu actionnaire majoritaire de la Bicig avec une prise de participation de 52 % dans son actionnariat, avait, pourtant, annoncé une mobilisation des ressources financières pour renforcer les capacités de la Bicig avec, notamment, l’acquisition d’infrastructures informatiques et de logiciels nécessaires à l’installation d’un nouveau Core Banking et le financement du développement des solutions digitales en faveur de la clientèle. Sauf que, plus de six mois après la signature du prêt avec la Banque de développement des Etats de l’Afrique centrale (BDEAC), qui a permis au groupe ivoirien de devenir actionnaire majoritaire, la réalité est tout autre. La banque n’est même plus capable de mettre à la disposition de sa clientèle une simple carte bancaire. C’est vraiment honteux !
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